Après le communiqué de presse de l’AP-HP indiquant une amélioration des « patients avec pneumonie COVID moyenne ou sévère » avec tocilizumab (voir HEMATO A LA UNE – Dépêche du 27 Avril 2020), c’est au tour de Sanofi et de son partenaire Regeneron de rapporter les premiers résultats de l’essai adaptatif de phase 2/3 mené avec un autre anticorps anti-IL-6, sarilumab (Kevzara*), chez des patients hospitalisés pour une détresse respiratoire « sévère » ou « critique » causée par une infection COVID-19.
Ces résultats préliminaires concernent la partie « phase 2 » qui a inclus 457 malades et qui comparait sarilumab à forte dose (400 mg), sarilumab à faible dose (200 mg) et un placebo, administrés par voie IV. Les patients présentaient lors de l’inclusion dans l’étude, une forme « sévère » de la maladie (28 %), une forme « critique » (49 %) ou une « défaillance multi-viscérale » (23 %). Ils étaient classés comme « sévères » s’ils avaient besoin d’une supplémentation en oxygène sans oxygénation mécanique ou à haut débit et comme « critiques » s’ils nécessitaient une ventilation mécanique ou une oxygénation à haut débit ou un traitement dans une unité de soins intensifs.
L’analyse des données a montré que sarilumab a fait rapidement baisser les concentrations de protéine C-réactive (CRP), marqueur clé de l’inflammation, et a permis d’atteindre le critère d’évaluation principal. La diminution de la CRP était respectivement de 21%, 77% et 79% dans les groupes placebo, sarilumab faible dose (Sfd) et sarilumab forte dose (SFd). Les niveaux initiaux d’IL-6 étaient élevés dans tous les groupes de traitement et particulièrement chez les patients « critiques ».
Lorsque les groupes « sévères » et « critiques » sont combinés, sarilumab ne montre pas un bénéfice clinique notable, en revanche des tendances positives sont observées pour l’ensemble des résultats dans le groupe de patients « critiques ». Ainsi, une amélioration clinique a été observée chez 59% des patients du groupe SFd (n = 88) et 51% du groupe Sfd (n= 94) versus 41% sous placebo (n = 44) avec un retrait de l’oxygénothérapie dans 58%, 43% et 41% des cas respectivement et une sortie de l’hôpital dans 53%, 39% et 41% respectivement. Au contraire, un passage sous ventilation ou un décès ont été notés chez 32%, 46% et 55% respectivement (passage sous ventilation dans 9, 10 et 27% des cas, décès dans 23, 36 et 27% des cas).
Enfin, il est à noter « qu’aucun nouveau résultat d’innocuité n’a été observé avec l’utilisation de sarilumab chez les patients atteints de COVID-19 ».
Au vu des résultats, Sanofi et Regeneron ont procédé à un examen des données du groupe de patients « sévères ». Les tendances négatives observées dans la phase 2 (n = 126) ne sont pas retrouvées dans la phase 3 (n = 276) et que les résultats cliniques sont équilibrés pour tous les groupes de traitement. Ainsi, les résultats du groupe de patients « sévères » sont meilleurs que prévus, sur la base de rapports antérieurs, indépendamment du traitement reçu : dans la partie phase 2 environ 80 % des patients ont pu quitter l’hôpital, 10 % sont décédés et 10 % sont restés hospitalisés.
La partie phase 3 de l’essai se poursuit et n’inclura plus que des patients « critiques » qui recevront la dose la plus élevée de sarilumab (400 mg). Actuellement plus de 600 patients ont été inclus dans le groupe « critique ». Regeneron et Sanofi ne connaissent pas les données de l’essai de phase 3, la levée de l’insu n’ayant pas été effectuée, et prévoient de rapporter ses résultats d’ici au mois de Juin.
Les deux sociétés conduisent également un second essai clinique hors des États-Unis. Le recrutement d’environ 400 patients est en cours en Italie, Espagne, Allemagne, France, Canada, Russie, Israël et Japon. Les premiers résultats sont attendus au troisième trimestre.
Il faudra donc attendre encore un peu pour être fixé sur l’intérêt éventuel des anticorps anti-IL-6 dans les pneumonies COVID-19 et quel(s) type(s) de malade(s) pourrai(en)t en bénéficier !